Mes plus belles larmes dans le RER seront pour vous…

Alors voilà, ça y est, c’est ma dernière semaine à Louise Michel, je vais bientôt partir vers de nouveaux horizons, je viens de me faire mal en lisant tous les mots trop gentils d’au revoir de mes incroyables collègues, je pleure, je ris… Et j’ai envie de vous écrire, cher·e·s fantastiques collègues et ami·e·s pour toujours, d’écrire à quel point vous êtes des stars, des êtres merveilleux, des héro·ïne·s de la société, le dire au monde, le hurler par écrit sur ce blog chéri et en profiter pour dire MERCI aussi à ce public génialissime qui nous aide chaque jour à rendre ce lieu assez unique. J’ai pondu beaucoup d’articles ces dernières années sur les livres qui m’ont fait braire dans le RER, mais la plus belle histoire qui me fera pleurer en reprenant le chemin de chez moi samedi soir c’est celle qu’on a écrite tou·te·s ensemble pendant six ans. ❤

Six ans de kif absolu, six ans où vous avez fait de moi celle que je suis, six ans de folie douce, six ans de taf intense, six ans de militantisme passionné et passionnant, six ans d’expériences incroyables et de rencontres pro et humaines chamboulantes. Vous ne vous rendez pas compte à quel point ce lieu, cette bibliothèque et celleux qui la peuplent ont changé ma vie, en toute simplicité, comme une histoire d’amour évidente et absolue.

Car derrière ce lieu de vie un peu foufou, un peu bohème, un peu bordélique, innovant dans le sens humain du terme, il y a une équipe (excuse-moi Quentin je vais tout féminiser car on va dire que le féminin l’emporte sur le masculin là.. 🙂 ) de travailleuses acharnées, de rêveuses, d’utopistes, de militantes, d’artistes, d’animatrices de teuf, de jardinières, de petits anges à paillettes, de bibliothécaires qui veulent changer le monde et qui y arrivent à leur échelle.

J’ai appris plusieurs choses essentielles auprès de ces êtres merveilleux ; essentielles pour être une bonne bibliothécaire et essentielles … dans la vie :

-Plus on est accueillante, bienveillante, à l’écoute, plus on recevra de la bienveillance, des sourires, de l’écoute. Ça paraît basique et ça fait un peu parole divine mais en fait, dans la vie quotidienne et ses tumultes, on a tendance à l’oublier. On se dit souvent ici qu’on a un public en or, un public 5 étoiles et trop mignon, c’est vrai ❤ mais je pense que c’est aussi parce que les bibliothécaires s’efforcent de les accueillir au mieux. On bosse énormément sur l’accueil, on se remet tout le temps en question, on va toujours plus loin dans la confiance qu’on accorde aux gens, on les valorise, on les motive à participer à la vie du lieu, on les kiffe et on les remercie. Et cette ambiance, ces usager·e·s, ces habitant·e·s, ça redonne un peu d’espoir en l’humanité, sincèrement. Ces petites bulles de vie en communauté joyeuse qu’offrent les bibliothèques, pour moi, c’est ce qui nous sauvera (oui, carrément!)

Aaaah ces soirées pyjamas à la bibliothèque!

-Nous ne sommes pas des neurochirurgiens donc si on se plante, ça ne fait de mal à personne (l’auteur de cette phrase se reconnaîtra même si ça fait bien trop longtemps que je ne l’ai pas vu ❤ ). En gros, cette « culture du test » enthousiasmante que l’on trouve à Louise Michel : on essaye plein de trucs, on bricole des choses nous-mêmes, on propose, on trébuche, on invente, on innove, tout ça avec un brin de folie et de spontanéité (pas toujours facile en fonction publique!). Quand on se plante, au pire il n’y a personne qui vient ou le truc s’essouffle mais bon, ce n’est pas si grave. 😉 Et puis en fait, souvent ça marche car c’est fun et pas prise de tête donc ça attire! Bon attention, spoiler, je ne suis pas non plus hyper objective dans ce moment de nostalgie du love.

La vie c’est un peu comme une tour de Kapla 😉

-Le rôle d’un·e bibliothécaire aujourd’hui paraît dépassé ou improbable pour certain·e·s alors qu’en fait on est hyper important·e·s dans la société. Hé oui, cette institution est toujours aussi nécessaire, attendue et demandée par les gens. Nous sommes un des seuls lieux en France où l’on peut rentrer gratuitement, sans carte ni rien et où personne ne va vous demander qui vous êtes et ce que vous voulez, et pour beaucoup de personnes, c’est très précieux. Ensuite, si on entre et si on reste, on est aussi un des derniers endroits en France où l’on va trouver un peu de chaleur humaine, du lien, du relationnel sans contrepartie, de la culture mais aussi des échanges de savoir-faire, des échanges de conversations, ou juste un canapé où flâner, sans devoir payer et sans jugement. Les 3èmes lieux tels qu’ils existent et Louise Michel telle qu’elle est constituent pour moi les derniers remparts d’humanité dans cette société carrément individualiste, mais c’est mon côté altermondialiste joyeuse qui parle hehe.

Et en plus on fait un super chocolat chaud…

-Ne pas oublier le fun, la joie, la bienveillance entre collègues, les rires, les déjeuners partagés, les thés verts à la menthe de Mariam qui rendent le public heureux. Cette équipe m’a donné chaque jour pendant 6 ans envie de me lever le matin, même pendant le COVID, même pendant les grèves de transport, même après les agressions, même quand j’étais enceinte de 6 mois, même quand je suis revenue de congé maternité, même après des insomnies de maman, tout le temps j’avais la joie au ventre de les retrouver et de faire ensemble ce qu’on fait de mieux : rendre cette bibliothèque joyeuse, accueillante, sécurisante et pailletée.

Des paillettes, toujours plus de paillettes…

Alors voilà, même si je m’en vais à la mer (et ça c’est super), même si mes nouvelles aventures professionnelles seront certainement intéressantes et géniales (je vais devenir cheffe et c’est en grande partie grâce à vous!), même si je repars dans ma belle région des Hauts-de -France et que j’aurai à nouveau à ma portée des kilos de mimolette demi-vieille, de chicons et de bières belges… Même si… Et bin, je suis quand même profondément triste de quitter ce lieu, et de vous quitter vous, mes collègues chéri·e·s de l’amour. Et profondément triste aussi de quitter ces habitant·e·s, ce public de folie, car quel public ! Je n’en avais jamais vu un comme ça! Vous êtes des gens incroyables dans ce quartier de La Réunion et vous allez me manquer terriblement ; ces enfants qui viennent quasiment quotidiennement et qui sont hyper moteurs, notre jardinier en chef qui vient tous les week-ends s’occuper du jardin bénévolement, qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il neige, toutes ces dames à qui j’ai fait des mini-cours d’informatique et qui m’offraient toujours beaucoup trop de chocolats pour me remercier, toutes ces personnes avec qui j’ai parlé de leurs derniers coups de coeur ou de leurs envies/idées pour la bibliothèque, toutes ces histoires lues sur le tapis et ces enfants qui s’installaient tranquillou dans ma robe, toutes ces parties de Mistigri et ces tricheries éhontées, tous ces BISOUUUUS hurlés dans le micro à la fermeture… Tous ces gens m’ont permis de me construire dans mon rôle de bibliothécaire et bien plus encore… Et je sais qu’un bout de mon coeur restera à jamais Rue des haies.

Mais peut-être que je reviendrai faire des monstres sur les vitres, qui sait?
Ou lire des histoires le soir déguisée en panda ?…

Sur ce, je m’en vais prendre mon RER, un paquet de mouchoirs et des canards en plastique plein les poches, j’essuierai mes larmes plus tard mais là j’ai juste envie de vous dire avec ma voix de poissonnière par écrit une dernière fois : J’vous aime tellement ! Gardez la foi et la flamme et prenez soin de vous et de cette belle utopie qu’on a fait vivre ensemble! ❤

Vous me manquez déjààààààààà…

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